Du 30 juillet au 5 août 1947 eut lieu à SEELISBERG (Suisse) une conférence internationale extraordinaire du COUNCIL OF CHRISTIANS AND JEWS, pour étudier les causes de l’anti-sémitisme chrétien et tenter d’y porter remède.
Parmi les soixante-dix personnalités venues de dix-sept pays, on comptait vingt-huit juifs (dont Jules ISAAC), vingt-trois protestants, neuf catholiques et deux orthodoxes grecs. Lors de cette conférence, les Chrétiens prirent conscience de l’état de l’enseignement chrétien à l’égard des Juifs et du judaïsme. Ils mesurèrent l’étendue de la responsabilité chrétienne dans le génocide hitlérien et comprirent qu’il fallait d’urgence corriger l’enseignement chrétien. Ils élaborèrent dix points, largement inspirés des dix-huit propositions de l’historien Jules ISAAC pour éradiquer les préjugés contre les Juifs.
- Rappeler que c’est le même Dieu vivant qui nous parle à tous, dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament.
- Rappeler que Jésus est né d’une Vierge juive, de la race de David et du Peuple d’Israël, et que Son amour éternel et Son pardon embrassent son propre peuple et le monde entier.
- Rappeler que les premiers disciples, les Apôtres et les premiers martyrs étaient juifs.
- Rappeler que le précepte fondamental du Christianisme, celui de l’amour de Dieu et du prochain, promulgué déjà dans l’Ancien Testament, et confirmé par Jésus, oblige « Chrétiens et Juifs » dans toutes les relations humaines, sans aucune exception.
- Éviter de rabaisser le judaïsme biblique ou post-biblique dans le but d’exalter le Christianisme.
- Éviter d’user du mot « juifs » au sens exclusif de « ennemis de Jésus » ou de la locution « ennemis de Jésus » pour désigner le peuple juif tout entier.
- Éviter de présenter la Passion de telle manière que l’odieux de la mise à mort de Jésus retombe sur les juifs seuls. Ce ne sont pas les Juifs qui en sont responsables, car la Croix, qui nous sauve tous, révèle que c’est à cause de nos pêchés à tous que le Christ est mort. (Rappeler à tous les parents et éducateurs chrétiens la grave responsabilité qu’ils encourent du fait de présenter l’Evangile et surtout le récit de la Passion d’une manière simpliste.
En effet, ils risquent par là d’inspirer, qu’ils le veuillent ou non, l’aversion dans la conscience ou le subconscient de leurs enfants ou auditeurs. Psychologiquement parlant, chez des âmes simples, mues par un amour ardent et une vive compassion pour le Sauveur crucifié, l’horreur qu’ils éprouvent tout naturellement envers les persécuteurs de Jésus, tournera facilement en une haine généralisée des Juifs de tous les temps, y compris ceux d’aujourd’hui.)
- Éviter de rapporter les malédictions, scripturaires et le cri d’une foule excitée : « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants », sans rappeler que ce cri ne saurait prévaloir contre la prière infiniment plus puissante de Jésus : « Père, pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. »
- Éviter d’accréditer l’opinion impie que le peuple juif est réprouvé, maudit, réservé pour une destinée de souffrances.
- Éviter de parler des Juifs comme s’ils n’avaient pas été les premiers à être de l’Église.
Ce message a été rédigé par les membres chrétiens de la Commission religieuse à l’intention des chrétiens. Afin d’éviter tout malentendu, les délégués juifs de cette Commission ont précisé dans une déclaration écrite, qu’ils ne prenaient aucune position quant aux implications théologiques et historiques du texte.
Les participants à cette conférence : le premier assis à gauche, le Grand Rabbin de Roumanie, Alexandre Safran ; derrière lui, debout : le Grand Rabbin adjoint de France, Jacob Kaplan ; l’écrivain Josué Jéhouda, de Genève ; le professeur Selig Brodetzki, président du Conseil représentatif des Juifs d’Angleterre. (L’antisémitisme. Résultats d’une conférence internationale de chrétiens et juifs. Seelisberg, Suisse 1947. Edité par le Conseil International de Chrétiens et Juifs, Genève).