Les soeurs de Notre-Dame de Sion et Nostra Aetate

AJCF. Remise du prix aux soeurs de Notre-Dame de Sion. 2012Les Sœurs de Notre-Dame de Sion Dominique de La Maisonnneuve et Louise Marie Niesz ont reçu le prix de l’Amitié Judéo-Chrétienne de France le lundi 15 octobre 2012 à 18h30 au Collège des Bernardins à Paris. Dossier complet Prix AJCF 2012.

A cette occasion Stéphanie Dassa, membre du Comité Directeur de l’AJCF, leur a posé trois questions :

Pourquoi est-ce vers les Sœurs de Notre Dame de Sion que les évêques qui ont contribué à l’élaboration de Nostra Aetate se sont tournés pour mesurer la réception dans les Églises de ce texte fondamental ?
Plus largement, quelle a été la contribution de votre congrégation dans la longue entreprise de réconciliation entre l’Église catholique et les Juifs ?

Si, à la fin du Concile, quelques évêques se sont adressés à notre Congrégation pour suivre la « réception » de la Déclaration Nostra Aetate c’est vraisemblablement parce qu’ils connaissaient l’orientation des Sœurs de Notre Dame de Sion. Il faut noter ici les paroles que le Cardinal Augustin Béa adressa aux sœurs engagées dans les relations judéo-chrétiennes, qui se trouvaient en session à Rome en novembre 1965 :

La Déclaration, solennellement approuvée par le Saint-Père, votée par la majorité énorme du Concile, est un programme pour tous, mais surtout pour vous, sœurs de Notre Dame de Sion.
Jusqu’ici votre tâche était fondée surtout sur vos Constitutions et sur vos Règles, maintenant cette même tâche vous est proposée par l’Église elle-même. La Déclaration est donc un vrai programme pour votre travail.

À cette première raison, l’on peut ajouter : la collaboration assumée par certaines sœurs, en lien avec le Conseil Général de la Congrégation, à l’élaboration de schémas théologiques pour la commission de travail devant aboutir au texte de la Déclaration Nostra Aetate. Également, les nombreux contacts pris avec un certain nombre d’évêques et d’experts pendant les intersessions, afin de les sensibiliser à l’importance de la relation de l’Église avec le peuple juif, à l’importance de resituer le peuple juif et le judaïsme à la racine de la foi chrétienne.

Aujourd’hui ces orientations sont clairement exprimées dans les Constitutions de la Congrégation (approuvées et éditées en 1984) : « Nous sommes appelées à témoigner par notre vie de la fidélité de Dieu à son amour pour le peuple juif et aux promesses qu’il a révélées aux patriarches et aux prophètes d’Israël pour toute l’humanité. »

Après le Concile, il fallait mettre en œuvre, dans l’Église, les directives de la Déclaration. Différents Centres furent créés en plusieurs pays pour la formation des chrétiens : connaissance du judaïsme, relecture de la Bible en tenant compte de la Tradition orale du judaïsme, enseignement de l’hébreu et nombreux contacts avec des membres de la communauté juive.

Sœur Dominique de La Maisonneuve, vous avez déclaré au quotidien La Croix : « Ce qui se passe sur la terre d’Israël aujourd’hui est le signe de l’incapacité dans laquelle sont les hommes de vivre avec leurs frères. Israël demeure le miroir dans lequel l’humanité peut regarder le visage qu’elle a, l’image de son comportement avec les hommes et avec Dieu. » (La Croix.com 23/07/2010). Le reflet du miroir n’est pas à l’avantage de l’humanité… Ne pensez-vous pas que cette responsabilité d’Israël d’être une image réfléchie de l’humanité est écrasante ?

Non pas écrasante au sens propre où elle priverait Israël de sa liberté, le réduirait à un objet sous la main puissante de Dieu. Car Dieu a créé l’homme libre et même la vocation-élection d’Israël n’attente pas à cette liberté. Je cite de mémoire le Cardinal Lustiger : chaque juif a à choisir d’être juif, il a à choisir d’être choisi, il a à choisir d’être élu. Chaque juif a à assumer la vocation du peuple – comme il assume à Kippour les péchés de la communauté. Assumer est le mouvement contraire de l’écrasement…

La responsabilité d’Israël n’en est pas moins lourde, infiniment lourde, à la mesure de son choix, « le choix de Dieu ». Car l’élection n’est pas un privilège – mais un « plus » de devoirs à l’égard de l’humanité. La récompense aussi sera à la mesure de Dieu… dans le monde à venir… Ceci relève du mystère de Dieu…

Sœur Louise-Marie Niesz, qu’est-ce qui motive ceux et celles qui s’inscrivent aux cours dispensés par le SIDIC ? Que vient-on y chercher ?

C’est vrai que les personnes qui s’adressent au SIDIC sont « en recherche ». En recherche, parfois de leur identité en raison d’une origine juive plus ou moins lointaine, parce que leur conjoint/e est juif/ve et qu’ils veulent connaître sa culture, sa religion, en recherche d’un renouvellement de la Parole de Dieu lue avec l’éclairage de la tradition orale du judaïsme, ou encore à travers l’apprentissage de l’hébreu, parfois en recherche d’un nouveau regard sur le peuple juif comme l’a demandé le Concile Vatican II, enfin aussi pour découvrir ou redécouvrir les ‘racines juives’ de la foi chrétienne et prendre en compte l’identité juive de Jésus.

Propos recueillis par Stéphanie Dassa pour le site du CRIF.

Article détaillé sur les deux sœurs, leur vie, leur charisme, de Martine de Sauto, publié sur le site de la Croix le 15/10/2012.